L’impact de la classe sociale sur l’incidence des cancers se précise en France
Plus l’environnement socio-économique est défavorable, plus l’incidence de certains cancers augmente. C’est ce que révèle une étude dirigée par Joséphine Bryère, de l’Inserm, et publiée dans le dernier BEH. Si, sans surprise, c’est le cas pour ceux des voies aérodigestives hautes, d’autres cancers sont également concernés. A l’inverse, un contexte socialement favorable peut aussi s’avérer un élément péjoratif sur l’incidence d’autres types de cancers ! Reste qu'au total, les auteurs estiment que 15 000 cas de cancers seraient évitables en France via l’amélioration des conditions de vie et la promotion de la santé des plus défavorisés.
Un indice européen EDI réplicable à tous les pays d’Europe
En effet, des scientifiques ont essayé de quantifier l’impact de l’environnement socio-économique sur l’incidence des cancers. Ces travaux, premiers du genre en France, sont basés sur un nombre considérable de données provenant des registres du réseau national Francim établis dans 16 départements entre 2006 et 2009. Pour des raisons statistiques, seules les 15 tumeurs solides et les 3 hémopathies malignes les plus fréquentes ont été analysées.
Lors de recherches, pour évaluer le contexte économique des individus, les spécialistes ont eu recours à l’indice européen agrégé de défavorisation sociale (European deprivation Index ou EDI) qui se basait sur des informations fournies lors du recensement de 2007.
Un gradient d’incidence avec la dévalorisation sociale mais pas que…
Avec un environnement socio-économique défavorable, les cancers de l’estomac, du foie, des lèvres, de la bouche, du pharynx et du poumon augmenteraient pour les deux sexes, tout comme les cancers du larynx, du pancréas, de l’œsophage et de la vessie pour les hommes et les cancers du col de l’utérus pour les femmes.
A contrario, l’incidence de certaines catégories de cancers serait en hausse pour les populations favorisées comme le mélanome pour les deux sexes, ceux de la prostate et des testicules pour l’homme, du sein et des ovaires pour la femme.
D’après les calculs, la proportion des cas de cancers attribuables à l’appartenance à un niveau social faible était la plus forte pour les cancers du larynx (30,1 %), des lèvres- bouches-pharynx (26,6 %), et du poumon (19,9 %) pour la gent masculine. Pour la gent féminine, on remarque également les cancers lèvres- bouches-pharynx avec 22,7 % ainsi que ceux du col de l’utérus (21,1 %).
Si une partie des résultats confirme le surrisque lié à la défavoristion sociale pour les cancers des voies respiratoires et digestives hautes qui peut s’expliquer par le tabagisme ou l’exposition professionnelle, une autre partie met en évidence une influence sur d’autres localisations comme le foie, la vessie, le pancréas, ou l’estomac sans que l’on puisse identifier les mécanismes médiateurs. De même, la favorisation sociale entraînerait une hausse de l’incidence de cancers. Or, si pour la prostate, le dépistage plus fréquent dans les milieux sociaux plus aisés peut expliquer cette augmentation qu'en est-il du cancer de l’ovaire pour les femmes ? Ou du mélanome ? Des travaux futurs devront être mis en œuvre pour tenter de comprendre ces associations.