Propositions de l’IGAS à la loi Leonetti-Claeys sur la fin de vie
La loi Leonetti-Claeys du 2 février 2016 sur la fin de vie offre « une réponse adaptée à la prise en charge de l'immense majorité des parcours de fin de vie », estime l'Inspection des affaires sociales (IGAS) dans un rapport publié mi-juin, tout en suggérant quelques ajustements. « Limités », précise l'IGAS, insistant sur l'importance « de la stabilité du cadre juridique, condition de sa bonne appropriation par les professionnels et les personnes en fin de vie » – même si des voix (de non-médecins) se sont élevées lors des États généraux de la bioéthique pour demander sa révision.
Au chapitre des motifs de satisfaction, le rapport rédigé par le Pr Luc Barret, spécialiste de médecine légale, Stéphanie Fillion et Louis-Charles Viossat, salue une appropriation progressive de la loi, qui se traduit par l'augmentation du nombre de personnes qui connaissent la législation et rédigent des directives anticipées (notamment grâce aux campagnes d'information), mais aussi par le développement du dialogue sur la fin de vie entre soignants et patients, et un meilleur recours à la sédation profonde et continue jusqu'au décès. À côté des nouveaux droits pour les patients (directives anticipées contraignantes et droit à la sédation), l'IGAS se félicite que l'enseignement des soins palliatifs en formation initiale et continue des médecins et soignants soit porté au niveau législatif.
Mais de nombreux obstacles persistent à l'application pleine et entière de cette loi ; l'IGAS émet 30 recommandations pour les lever et lutter contre l’inégalité des situations selon les territoires et les équipes.
30 recommandations
Un premier volet de mesures porte sur la nécessité de développer les données statistiques et épidémiologiques sur la fin de vie, et d'encourager les projets de recherche nationaux sur le sujet. Évoquant des problèmes de gouvernance, l'IGAS suggère d'auditer le Centre national des soins palliatifs et de la fin de vie, afin de savoir s'il est capable de gérer une plateforme statistique et épidémiologique.
Le rapport appelle à franchir une étape – sous l'égide du CNSPFV – dans la communication à l'égard du grand public et des soignants sur la fin de vie et en particulier sur la sédation profonde et continue jusqu'au décès.
En matière de formation, l'IGAS plaide pour un renforcement de la formation initiale et continue des médecins et soignants, et une meilleure structuration d'une spécialité universitaire de médecine palliative, qui devrait prendre le nom d'« épistémologie clinique et médecine palliative » au sein du Conseil national des universités (CNU). À la clef, des postes de PU-PH, assistants chefs de clinique et professeurs associés de médecine palliative doivent être créés.
Directives anticipées, personne de confiance et traçabilité des décisions
L'IGAS suggère plusieurs évolutions des dispositions de la loi du 2 février 2016 pour les rendre plus effectives. Pour encourager la rédaction des directives anticipées, elle propose une adaptation de la majoration pour coordination infirmière ou l'instauration d'un forfait fin de vie, pour que les infirmiers libéraux aident à leur rédaction. La personne de confiance doit être renforcée : ses différents statuts, dans le code de l'action sociale et des familles, et dans celui de la santé publique, doivent être harmonisés.
Concernant la sédation profonde et continue jusqu'au décès, la traçabilité des décisions doit être améliorée ; le cadre réglementaire de l'usage du midazolam doit être précisé tout comme l'usage de cette pratique à domicile – qui doit être réservée aux services d'hospitalisation à domicile et aux équipes mobiles de soins palliatifs. Quant à la procédure collégiale, un médecin désigné par la personne de confiance devrait pouvoir y participer. En cas de dissensus, une médiation à durée limitée devrait être possible, à la demande de la personne de confiance et du médecin en charge du patient.
Enfin, l'IGAS appelle les pouvoirs publics à accorder une attention plus soutenue aux publics les plus vulnérables : les personnes souffrant de troubles cognitifs profonds, en particulier les patients Alzheimer, les polyhandicapés, les mineurs (qui dès 15 ans devraient pouvoir rédiger des directives anticipées et désigner une personne de confiance), les minorités, les exclus.